Seule une infime minorité de groupes ont des personnes de couleur ou aux noms à consonance non-européenne parmi leurs cadres dirigeants.
L’égalité des chances à la française est-elle un leurre ? La devise de l’égalité, justice, fraternité, un mythe ? En tout cas, ces valeurs se reflètent très peu, voire quasiment pas, dans le monde des affaires, ce milieu où se décide la marche du pays en dehors du cercle politique.
Selon un rapport conjoint publié le 22 novembre dernier par la Fondation Mozaïk et le cabinet spécialisé Me-YouToo, la moitié des sociétés du SBF 120 à la date du 1er novembre – l’indice boursier regroupant les 120 plus grandes entreprises françaises – présente un visage monochromatique à leur sommet.
Autrement dit, marqué par une homogénéité ethnique comprenant des personnes blanches, d’origine européenne.
Des mécanismes discriminatoires profondément ancrés
Les chiffres révélés à cet effet sont évocateurs. Sur 3 159 membres des comités exécutifs et conseils d’administration passés au peigne fin, seuls 6,5% des dirigeants en comité exécutif et 6,8% en conseil d’administration sont considérés comme « ethniquement divers ».
Une réalité d’autant plus préoccupante que la situation n’aura progressé que de 0,6 point depuis 2022, année de publication de la première édition de cette étude. Une évolution plutôt timide donc, témoignant peut-être d’une réticence au changement, pourtant nécessaire face à la réalité multiculturelle de la France contemporaine.
Ceci même si le racisme systémique reste prégnant, et que les idées d’extrême droite s’enracinent dans la société, avec près de quatre Français sur dix adhérant aux thèses du Rassemblement national, selon le baromètre annuel de l’institut Verian réalisé pour « Le Monde » sur l’image du parti de Marine Le Pen et publié le 25 novembre dernier.
Le temps de regarder la réalité en face
« Il y a des mécanismes systémiques qui font qu’on ne part pas tous avec la même chance et qu’on passe à côté de gens motivés, qui ont le talent, la compétence et qui se retrouvent confrontés à des plafonds de verre », commente Inès Dauvergne, PDG de Me-YouToo, dans les colonnes du Parisien.
Face au « tabou » français des statistiques ethniques – elles sont particulièrement difficiles d’accès –, les auteurs de l’étude préconisent une approche radicale consistant notamment à imposer plus de transparence aux entreprises. L’objectif est de valoriser les bons élèves et créer une forme d’émulation auprès des entreprises réfractaires au changement.
« Cette étude a pour vocation d’aider les dirigeants à se rappeler que le paramètre ethnique est une question fondamentale et qu’on ne peut pas être dans le déni ni dans le communautarisme économique », tranche Saïd Hammouche, président de la Fondation Mozaïk, auprès de l’AFP.