La Sécurité sociale court le risque d’une dérive financière insoutenable face au creusement vertigineux de son déficit, selon une alerte de la Cour des comptes.
Dans un exercice diagnostic sans concession, la Cour des comptes a fait l’état des finances de la Sécurité sociale, lundi 26 mai. Le gendarme des comptes publics agite le spectre d’une crise de liquidité au niveau de la Sécu, de quoi compromettre sa capacité à assumer son rôle de protection des Français.
À l’origine de cette sortie alarmante de la Cour des comptes à travers son président Pierre Moscovici, figurent des années de déficit de plus en plus vertigineux. Ainsi, de 15,3 milliards d’euros en 2024, le déséquilibre devrait atteindre 22,1 milliards d’euros cette année.
Ce déséquilibre devrait se creuser davantage en 2028 pour atteindre 24,1 milliards d’euros selon des prévisions pourtant optimistes, comme l’indique Le Monde. Cela conduit les magistrats de la rue Cambon à décrire la trajectoire des comptes sociaux comme « hors de contrôle », d’après les termes rapportés par le quotidien du soir.
Selon le journal, cette situation est d’autant plus inquiétante que la France n’est pas en état d’urgence comme lors de la crise sanitaire du Covid par exemple.
Un mécanisme de financement à bout de souffle
Autre élément non moins inquiétant, l’architecture financière qui permettait jusqu’alors d’absorber les déficits sociaux montre aujourd’hui ses limites. C’est le cas de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), désormais incapable de jouer son rôle d’amortisseur, selon la Cour des comptes.
Le recours à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), la caisse nationale des Urssaf, n’est pas non plus une option viable. L’institution ne peut emprunter que pour deux ans maximum, alors qu’elle devra gérer 41 milliards d’euros de dette sociale, un montant susceptible de tripler d’ici 2028.
De fait, Pierre Moscovici et ses pairs considèrent comme « sérieux » le risque de ne pas pouvoir assurer le financement de la Sécurité sociale, au-delà de 70 milliards d’euros d’endettement annuel pour l’Acoss.
Des solutions techniques insuffisantes
Face à ce tableau critique, plusieurs pistes techniques émergent, mais toutes se heurtent à des obstacles politiques et réglementaires majeurs. L’extension de la durée d’existence de la Cades au-delà de 2033, échéance de sa mission, apparaît quasi impossible par voie législative en raison du contexte volatile à l’Assemblée nationale.
Il en va de même pour l’option consistant à doter la Cades de ressources additionnelles afin d’alléger le poids financier assumé par l’Acoss, ce qui nécessiterait une augmentation des prélèvements obligatoires. Une perspective qui va à l’encontre des orientations des responsables politiques.
« Une nouvelle reprise de dette par la Cades ne résoudrait pas le problème de fond », relève de toute façon la Cour des comptes, qui prône plutôt un « retour à l’équilibre impliquant des mesures d’économie et de maîtrise des dépenses ».