Dans un nouvel avis consultatif historique, la Cour internationale de justice impose aux États des obligations strictes de protection du système climatique et ouvre la voie à des réparations pour les pays les plus affectés.
Pour la première fois depuis sa création en 1945, la Cour internationale de justice (CIJ) s’est prononcée mercredi 23 juillet sur l’environnement. Et cette première fera assurément date. La Cour basée à La Haye qualifie en effet d’acte « internationalement illicite » toute violation par un État de ses obligations climatiques.
Plus révolutionnaire, elle ouvre la voie à des « réparations » que pourraient exiger les pays les plus affectés par le réchauffement climatique auprès des nations responsables des plus importantes émissions de gaz à effet de serre (GES).
« La Cour considère que les traités relatifs aux changements climatiques mettent à la charge des États des obligations strictes de protéger le système climatique et d’autres composantes de l’environnement contre les émissions anthropiques de gaz à effet de serre« , écrit la plus haute juridiction mondiale dans cet avis d’autant plus marquant qu’il émane à l’unanimité de ses 15 juges.
C’est seulement la cinquième fois que les juges se prononcent à l’unanimité sur une question depuis la création de la Cour, selon l’ONU.
Un arsenal juridique renforcé
« La Cour conclut que les CDN (plans d’action climatique) ne sont pas laissées à l’entière appréciation des parties, contrairement à ce qu’ont soutenu certains participants, mais doivent satisfaire à certaines normes prévues par l’accord de Paris« , peut-on lire dans le document de 140 pages, rejetant l’argument des États entendus de cette procédure consultative.
Dix-huit pays particulièrement vulnérables aux conséquences du réchauffement climatique, dont l’archipel du Pacifique du Vanuatu, avaient en effet saisi la CIJ en 2023 pour établir la responsabilité des pollueurs ainsi que les conséquences juridiques y afférentes.
L’innovation majeure de cet avis réside dans l’établissement d’un lien direct entre changements climatiques et droits humains. « La protection de l’environnement est une condition préalable à la jouissance des droits de l’homme« , insistent les juges dans leur décision qui dépasse largement le cadre des traités climatiques existants.
Vers d’âpres batailles
Si les accords de Paris (2015), le protocole de Kyoto (1997) et la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (1992) constituent la base des obligations étatiques, la Cour étend cette responsabilité au droit international coutumier.
Cela signifie que même les États désengagés des accords internationaux à l’instar des États-Unis de Donald Trump, ne sauraient être exonérés de leur inaction climatique.
« L’impunité climatique n’est plus autorisée. Ceux qui ont causé les dommages les plus importants sont tenus d’apporter des solutions aux personnes les plus touchées« , se réjouit Vishal Prasad, directeur de la campagne Pacific Islands Students Fighting Climate Change, dans les colonnes du Monde.