Le procès-fleuve de France Télécom (devenu Orange en 2013) s’ouvre enfin ce lundi 6 mai, plus d’une décennie après Next, le plan de réduction catastrophique du personnel. Trois ex dirigeants du groupe, dont l’ancien PDG au moment des faits, Didier Lombard, comparaissent à partir d’aujourd’hui devant le tribunal correctionnel de Paris pour des faits de harcèlement moral ayant conduit à de multiples suicides entre 2007 et 2010.
Sortir « par la fenêtre ou par la porte » de gré ou de force
Ce lundi 6 mai, trois anciens dirigeants de France Télécom, rebaptisé Orange en 2013, comparaissent devant le tribunal correctionnel de Paris, dans l’affaire du « crash program ». Ce sont l’ex PDG au moment des faits Didier Lombard, de son bras droit Louis-Pierre Wenès et de l’ex-directeur des ressources humaines Olivier Barberot. Ils sont accusés d’avoir mis en place, entre 2007 et 2010, une restructuration sauvage et inhumaine du groupe de télécom à travers des pressions, des mobilités forcées, la placardisation, les harcèlements et humiliations. Cet arsenal répressif avait pour objectif de forcer les agents et les salariés à sortir « par la fenêtre ou par la porte », selon les propres mots de Didier Lombard.
Certains salariés ont sombré dans de graves crises de dépressions, d’autres ont tenté de mettre fin à leurs jours. Même ceux qui restaient étaient soumis à des pressions et des chantages énormes. Ce traitement brutal du personnel s’inscrivait dans le cadre du plan de réduction du personnel Next. Instauré en 2005, celui-ci prévoyait 22 000 suppressions de postes dans l’entreprise, 10 000 mobilités et 6 000 recrutements.
« un harcèlement organisé à l’échelle d’entreprise »
Quatre autres cadres, dont une encore en fonction chez Orange, doivent également comparaître pour complicité de harcèlement moral. Ils encourent chacun 15 000 euros d’amende et un an de prison. Dans l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, les juges ont constaté « un harcèlement organisé à l’échelle d’entreprise » de la part des dirigeants de France Télécom et pointé du doigt « la manière dont la conduite de cette restructuration a été faite ». C’est la première fois qu’un cador du CAC 40 se retrouve devant les tribunaux pour des faits similaires.
Les accusés parlent d’une politique novatrice
La défense assure de son côté que les juges devraient prendre en compte le contexte économique de cette restructuration. Elle insiste sur le fait que l’entreprise était alors très fortement endettée, en plus de faire face à une concurrence offensive, notamment de la part de Free. Quant aux accusés, ils seraient dans le déni depuis le début de l’instruction. Ils estiment qu’ils ont mis en place une politique totalement novatrice sur le plan du droit social.
Orange ne va toujours pas bien
Malgré cette restructuration à pas forcés Orange n’en a toujours pas finir avec le malaise social puisque 12.192 postes ont été supprimés ces quatre dernières années. Le groupe télécom dit être prêt à assumer ses responsabilités en cas de condamnation. Le PDG actuel Stéphane Richard a appelé l’ensemble des salariés à la solidarité en ces moments difficiles. Le délibéré de ce procès-fleuve sera probablement rendu en novembre prochain.