Selon un rapport publié ce lundi par le Défenseur des droits, l’accès aux soins des étrangers malades est très difficile en France. L’autorité administrative pointe du doigt une suspicion générale envers les étrangers, les idées préconçues et certains dispositifs contradictoires.
Le titre de séjour : un parcours de combattant
Trois ans après un premier rapport, le Défenseur des droits réitère son constat selon lequel les malades étrangers sont l’objet de « suspicion » et d’« idées préconçues » qui rendent difficile leur accès aux soins et à leurs droits en général. Jacques Toubon met en cause certaines réalités et dispositions en vigueur telles que le contrôle de la régularité du séjour, devenu « plus restrictif qu’auparavant » et les difficultés d’affiliation pour les étrangers récemment installés en France. Le rapport souligne aussi les « difficultés accrues » des étrangers malades à obtenir un titre de séjour pour se faire soigner depuis la réforme de l’assurance-maladie de 2015 qui a conduit à une « baisse drastique des avis médicaux favorables au maintien sur le territoire ». Le Défenseur des droits note en outre que « l’accès au séjour des personnes porteuses du VIH demeure préoccupant ».
L’AME jugée dérogatoire, coûteux et discriminatoire
Jacques Toubon a surtout évoqué les « préjugés » entourant les étrangers malades, dont celui d’un « appel d’air » censément créé par le système de soins français. Or cette idée est « contredite par plusieurs études », la majorité des malades découvrant leur pathologie « à l’occasion de bilans de santé réalisés bien après » leur entrée sur le territoire français ». D’ailleurs, le rapport du Défenseur des droits indique que seuls 2% des 255.550 titres de séjour délivrés l’an dernier l’ont été pour raison médicale.
Pour ce qui concerne les étrangers en situation irrégulière, le Défenseur déplore avec l’Aide médicale d’Etat (AME) « un dispositif dérogatoire, coûteux et favorisant des pratiques discriminatoires », auxquelles s’ajoutent des « refus de soins » illégaux mais souvent justifiés « par le surcoût administratif voire financier » pour les médecins. Cela peut passer par « un refus direct » de prise en charge ou être « indirect », par le biais des horaires limités de rendez-vous ou la demande de justificatifs administratifs supplémentaires.
« la prise en charge tardive plus lourde qu’une prise en charge précoce »
Enfin, alors que la suppression de l’AME (jugée trop coûteuse) est de plus en plus demandée, Jacques Toubon y voit un « enjeu majeur de santé publique » et prévient contre le risque de réserver à certains un « accès résiduel » aux soins. Selon lui, la prise en charge tardive d’une personne non soignée « sera plus lourde qu’une prise en charge précoce ».