Vieillir ensemble : l’autre choix des familles françaises

Si placer ses aînés en structure spécialisée semble être la norme, certaines régions de France résistent encore à cette tendance, malgré les contraintes croissantes de la vie moderne.

Contrairement à l’Afrique, où la vieillesse est considérée comme une grâce et où garder les personnes âgées au sein du foyer familial est une pratique naturelle, le monde occidental se caractérise par un éclatement des structures familiales.

De quoi favoriser l’émergence de centres spécialisés comme les Ehpad pour prendre en charge les seniors. En France, ces établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes sont devenus un véritable secteur économique.

Malheureusement, des scandales de maltraitance ont entaché leur réputation, notamment celui impliquant le groupe Orpea, leader mondial des Ehpad et des cliniques privées, révélé par le livre-enquête « Les Fossoyeurs » du journaliste Victor Castanet paru en 2022.

De fait, seulement 8% des personnes âgées de plus de 85 ans vivent chez leurs proches aujourd’hui sur toute l’étendue du territoire national hexagonal, selon une récente étude de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) rapportée par Le Parisien.

Des disparités territoriales

Certains territoires affichent cependant des chiffres nettement supérieurs. C’est le cas dans les départements d’outre-mer où cette proportion avoisine les 30%. S’ensuivent la Corse avec 22%, le Gers avec 14%, ainsi que la Seine-Saint-Denis avec près de 13%.

« Des spécificités locales demeurent. Dans certaines régions rurales notamment, cela reste une caractéristique forte« , explique Chloé Tavan, cheffe de la division Enquêtes et études démographiques à l’Insee, dans les colonnes du Parisien. Ces écarts reflètent des réalités socio-économiques et culturelles propres à certains territoires.

Dans le Gers, par exemple, Sandrine Clarac, présidente de l’association « Mieux vivre chez soi » à Pouylebon, évoque la précarité financière – chez les personnes âgées issues du secteur agricole notamment – comme motivation principale à ce choix.

« La plupart ont de petites retraites, entre 700 et 800 € par mois. Certains enfants peuvent compléter et payer l’Ehpad dont le coût se situe plutôt autour de 2 000 € mensuels. D’autres ne peuvent pas« , indique-t-elle, citée par le quotidien francilien.

Les filles plus attachées à ce schéma

Mais le choix de garder un parent âgé à domicile relève bien souvent d’un mélange de motivations. « Pour de nombreuses familles, placer son parent en institution crée une honte, une culpabilité. On a l’impression de l’abandonner« , éclaire Alice Steenhouwer, directrice de l’association « Avec nos proches ».

« Avec les progrès de la médecine, on arrive aujourd’hui dans certaines familles à vivre à cinq générations concomitantes, mais il existe peu de lieux où la vie quotidienne en famille est possible et pratique. Nous ne sommes plus dans les années 1950, où le fils devait aider son père dans les champs et tout le monde vivait ensemble« , affirme le sociologue Michel Billé, spécialiste du handicap et de la vieillesse, pointant le paradoxe de cette époque.

Cette cohabitation s’organise généralement autour d’une figure particulière : la fille. « Ce sont surtout les filles, plus que les fils, qui hébergent leurs parents« , remarque Alice Steenhouwer.

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