Alors que Geoffroy Lejeune prenait ce mardi 1er août la tête du Journal du Dimanche (JDD), les salariés du média mettaient fin à leur grève après cinq semaines consécutives d’arrêt de travail. Les journalistes réclamaient la révocation de la nomination de leur nouveau directeur de la rédaction, proche de l’extrême droite.
Geoffroy Lejeune, marqué à l’extrême droite, a pris ce mardi 1er août la succession de Pierre Lazareff à la tête du Journal du Dimanche (JDD). Le nouveau directeur de la rédaction a débarqué dans un média vidé de ses salariés. Ces derniers étaient en grève depuis cinq semaines pour protester contre la nomination de l’ex dirigeant de Valeurs actuelles. Ils estiment qu’avec son arrivée, la ligne éditoriale du JDD basculerait vers l’extrême droite. Jusqu’ici, le média fondé en 1948 naviguait entre gauche et droite dans une liberté totale.
Les dirigeants de Lagardère sont restés sur leur position
Au JDD, les journalistes ont demandé en vain à leur direction de révoquer la nomination de Geoffroy Lejeune et de leur offrir des garanties d’indépendance juridique et éditoriale. Les dirigeants de Lagardère, propriétaire de l’hebdomadaire, ont maintenu leur position. Ils ont conclu dans la nuit d’hier un accord amer prévoyant des départs volontaires et un soutien financier. Dorénavant, les salariés doivent faire un douloureux choix. A savoir partir et quitter un média devenu une famille ou rester et voir le JDD dénaturé sans pouvoir rien faire.
« Là ou Bolloré passe, le journalisme trépasse »
L’hebdomadaire sera bientôt à la merci de Vincent Bolloré, qui a fait l’acquisition de Lagardère News via son groupe Vivendi. Le milliardaire possède déjà CNews (ex I-Télé), Paris Match, C8, Canal+ et Europe 1. Plusieurs organisations de défense de la liberté de la presse dénoncent cette « bollorisation » des médias français. Parmi elles, Reporters Sans frontières, qui pointe les opinions ultraconservatrices de Vincent Bolloré. L’organisation le considère comme un fossoyeur du journalisme indépendant. « Là ou Bolloré passe, le journalisme trépasse », avait laissé entendre son secrétaire général Christophe Deloire sur France Inter, le 1er juillet dernier. Le militant représente le milliardaire en « un ogre qui digère les médias et les transforme en organe d’opinion ».
Cyril Hanouna, porte-parole de Vincent Bolloré sur C8
A C8, par exemple, les associations constatent que Bolloré distille ses opinions à travers les émissions. Il fait notamment passer ses idées d’extrême droite et son climato-scepticisme via « Touche pas à mon poste (TPMP) », animé par Cyril Hanouna, qui serait son porte-parole. Ce chroniqueur et son équipe sont régulièrement sanctionnés par l’Arcom (ex-CSA). Pour éviter de basculer dans les opinions de leur nouveau propriétaire, certains médias ont signé des accords en interne. Grâce à ces textes, ils peuvent peser dans la nomination de leur directeur. C’est notamment le cas de La Croix et Le Monde, où les journalistes sont consultés par le biais d’un vote.
Trois propositions de loi transpartisanes à l’Assemblée nationale
Au JDD, il n’y a rien de tout ceci. Ce qui permet à Lagardère d’agir comme bon lui semble. Cependant, cette situation a suscité un réveil législatif. En effet, depuis le 12 juillet, les députés ont déposé en soutien aux journalistes du JDD trois propositions de loi transpartisanes. Ces textes visent tous à protéger la liberté éditoriale des médias bénéficiant des subventions de l’Etat. Les parlementaires ont même participé à une manifestation des salariés du JDD le mercredi 19 juillet dernier près de l’Assemblée nationale. Une action qui donne un poids à la protestation et surtout nourrit de l’espoir.